Op art (optical art)
Mouvement artistique fondé sur l’illusion d’optique qui s’affirme vers la fin des années 1950. En développant les recherches visuelles entamées, dans le cadre de Bauhaus, par László Moholy-Nagy et par Josef Albers, et celles des recherches cinétiques du Futurisme (Giacomo Balla), l’Op art se propose d’effectuer une étude rigoureuse de la perception, dont il analyse les processus optiques et psychologiques, en rapport dialectique avec la technologie moderne. Une double préoccupation mobilise les artistes : d’une part, l’accent mis sur la détermination d’une méthode opérationnelle rigidement programmée ; d’autre part, l’intention d’impliquer le spectateur, qui est appelé à compléter l’œuvre d’art par sa simple présence.
Les recherches sur les effets de la sensation optique aboutissent peu à peu à celles qui expérimentent les possibilités de mouvement dans l’objet artistique (Art cinétique). Vasarely peut être considéré comme le chef de file de l’Op art dès 1944, suivi par des artistes comme Jesús-Rafael Soto, Yaacov Agam, François Morellet, Karl Gerstner, Julio Le Parc, Getulio Alviani, Ángel Duarte. En Amérique, l’Op art est présenté au public lors de l’exposition The Responsive Eye à New York en 1965. Des artistes américains, tels Richard Anuszkiewicz, Kenneth Roland, Ellsworth Kelly, Michael Kidner, Larry Poons, Bridget Riley, se rattachent à ce mouvement par leurs œuvres et leurs recherches sur les propriétés optiques de la couleur.
Victor Vasarely
Peintre français d’origine hongroise, Victor Vasarely (Pics, Hongrie 1908 – Paris 1997) se forme à l’académie Muhely à Budapest, sorte de Bauhaus hongrois, sous la direction de Bortnyk. En 1930, il s’installe à Paris et peint des toiles expressionnistes, cubistes et surréalistes. Il réalise sa première exposition à la galerie D. René en 1944, lors de l’inauguration de la galerie. En 1947, à Belle-Isle, il s’oriente vers l’abstraction en réduisant les galets et les vagues à des formes ovoïdes. En 1948, séjournant à Gordes, il radicalise son langage géométrique, et introduit une perspective illusionniste axonométrique (Santorin, 1950-51). Peu à peu, il évolue vers le cinétisme, les lignes parallèles se décalent, créent des reliefs ou des creux, le carré devient losange, le rond ellipse, les jeux de mouvement et de vibration dynamisent la composition lors de la période « blanc et noir » du milieu des années 50.
C’est pendant la période passée par Vasarely au Bauhaus de Budapest que lui apparaît pour la première fois « le caractère fonctionnel de la plasticité ».
À partir de 1959, il développe le système de « l’unité plastique » et du « prototype départ » (collage imprimé en sérigraphie) pour créer des multiples. Dès 1963, il aborde le volume par des reliefs et utilise des matériaux nouveaux comme l’aluminium et le verre. Il réintroduit la couleur l’année suivante, enrichissant sa gamme chromatique de plusieurs nuances et créant des systèmes de permutation programmés à l’avance (Arny, 1967-68, Paris, MNAM). Dès le début de sa carrière, Vasarely dépasse la peinture de chevalet en investissant l’espace (Hommage à Malevich, 1954 ; Œuvre profonde cinétique en lame d’acier, 1967 ; Signal polychrome, 1972), en réalisant des cartons de tapisseries tissées à Aubusson, en exécutant des sculptures, des grilles cinétiques… Il a fondé deux musées didactiques à Gordes en 1970, à Pecs en 1976 et un Centre de recherche architectonique à Aix-en-Provence en 1976.
« En effet, nous ne pouvons laisser l’œuvre d’art à la seule élite des connaisseurs. L’art présent s’achemine vers des formes généreuses, à souhait recréables ; l’art de demain sera trésor commun ou ne sera pas. » Victor Vasarely. Manifeste Jaune, 1955
Vasarely attachait une grande importance au principe du cinétisme pour deux raisons, l’une personnelle – la notion du mouvement le hantait depuis sa jeunesse -, l’autre plus générale : l’idée qu’un tableau animé par des effets optiques n’existe pas seulement sur le mur, mais surtout dans l’œil de le spectateur. Vasarely s’intéressait à la peinture, aux œuvres composées de plans distincts, ainsi qu’aux écrans et aux objets tridimensionnels.
Ellsworth Kelly
Peintre et sculpteur américain, Ellsworth Kelly (Newburgh, New York 1923-2015) étudie à l’École des beaux-arts de Paris où il s’installe en 1948. Il prend contact avec Brancusi, Arp, Vantongerloo, Picabia, Magnelli… Il donne alors des œuvres abstraites et géométriques s’inspirant de vues réelles, photographiées par lui. A partir de 1950, il réalise des assemblages de toiles monochromes architecturées entre elles. Son travail continue dans la même direction à New York, où il est revenu s’établir en 1954. Il utilise également l’aluminium où l’acier dans des panneaux uniformément peints, disposés contre le mur ou dans l’espace. Son œuvre va résolument en contra de l’abstraction lyrique alors triomphante, et annonce largement le minimalisme. A la fin des années 1960, il travaille de plus en plus systématiquement la forme des châssis, et inscrit la couleur dans une découpe géométrique irrégulière qui accentue son dynamisme.
Julio Le Parc
Peintre et sculpteur argentin, précurseur de l’Art cinétique et de l’Op art, Julio Le Parc (Mendoza 1928) après des études à l’École des beaux-arts (1943) à Buenos Aires, il se forme dans le climat des avant-gardes argentines et, notamment, au contact du mouvement spatialiste animé par Fontana. À Paris dès 1958, il travaille sur la perception des phénomènes lumineux et cinétiques, et participe à la fondation du Groupe de recherche d’art visuel (GRAV 1960). Sa première exposition personnelle a lieu à la Galerie D. René en 1966. Ses intérêts artistiques, que l’on peut relier à l’art systématique et cinétique, sont centrés sur le mouvement virtuel (Surfaces-séquences) et réel (les Ensembles, les Continuités-lumière), et sur les lieux (Labyrinthes, 1963 et 1965). En 2013 le Palais de Tokyo à Paris offre à cet artiste, sa première grande monographie en France depuis 40 ans.
François Morellet
Peintre français, François Morellet (Cholet 1926 – 2016) s’inscrit en 1945 à l’Ecole des langues orientales à Paris. En 1948, il reprend l’affaire familiale, mais sans abandonner la peinture qu’il avait commencée dès 1942; Ses premières œuvres sont résolument figuratives. En 1950, après quelques peintures inspirées de l’art primitif, il se tourne vers l’abstraction. Comprenant l’importance de Mondrian, il réduit ses compositions géométriques à la plus simple expression. Dès 1953, il recherche la neutralité dans la facture et établit un système à la base de chaque œuvre. En 1958, son art s’enrichit par l’introduction du hasard utilisé dans un cadre systématique (Réaction avec le noir et le blanc d’une couleur tirée au hasard, 1958). C’est aussi l’année où il crée sa première trame (Quatre Doubles, Trames traits minces). En 1961, il devient cofondateur avec Garcia-Rossi, Le Parc, Sobrino, Stein et Yvaral du groupe GRAV, qui correspond à l’époque du développement du cinétisme. En 1963, il utilise pour la première fois la lumière artificielle pour créer des images géométriques où il fait intervenir différentes combinaisons du hasard (Quatre Panneaux, 1963).
En 1970, Morellet élargi ses interventions au domaine de l’architecture et de l’environnement urbain : Deux Trames de tires 45°, 135° ; Sphère-trames, 1974. En 1973, son travail prend une orientation nouvelle. Il fragmente le support pour créer une géométrie sur le mur et dans l’espace (Cinq Toiles de 4 m de périmètre avec une diagonale horizontale). Il poursuit également ses recherches sur les interférences. En 1983, il inaugure une nouvelle forme d’expression en utilisant des fragments de branchages et de végétaux qu’il intitule Geometree. Ses dernières œuvres font intervenir à nouveau la fragmentation du support dans l’espace à l’aide de grandes toiles blanches, série qu’il dénomme La Géométrie dans les spasmes. L’originalité de sa réflexion, la persévérance dans l’élaboration de son système, ses renouvellements et ses innovations en font un des artistes les plus importants de la création contemporaine.
En 1983, François Morellet commence sa série des Geometree. Son amour des jeux de mots investit alors la langue anglaise : il mélange la géométrie et les « trees », c’est-à-dire les arbres, et plus spécialement les branches. Dans cet accouplement contre nature, rencontres et correspondances font naître une espèce d’hybride artistique. Et les branches de Morellet deviennent un artifice de la géométrie, au service d’une œuvre au carrefour de dada, de l’art conceptuel et de l’arte povera. (extrait du site lesabattoirs.org)
Jesús Rafael Soto
Peintre vénézuélien, Jesús Rafael Soto (Ciudad Bolivar 1923 – Paris 2005) fait ses études à l’École des Beaux-Arts de Caracas (1924-47) et en 1950 il s’installe à Paris. Sa première recherche sur le mouvement virtuel, et sur les vibrations optiques déterminées par des contrastes de figures géométriques, es lié à l’étude de Piet Mondrian, Josef Albers et Kazimir Malevich (Estudio para una serie, 1953 ; Métamorphosais, 1954). Il passe à une recherche cinétique proprement dite vers 1955, années où il participe à l’exposition Mouvement à la galerie Denise René aux côtés d’Agam, Tinguely, Jacobsen. A partir de 1967, il délaisse le tableau et passe à des Extensions qui aboutiront à investir la totalité de l’espace tel le Pénétrable (1969), fait de fils de nylon suspendus du plafond jusqu’au sol où le spectateur se promène sans repères visuels. Il réalise également des œuvres qui s’intègrent à l’architecture (usines Renault, Boulogne-Billancourt, 1975 ; Centre Banane à Caracas, 1979).
La problématique de Soto se fonde essentiellement sur les modifications de perception déterminées par le mouvement du spectateur devant ou dans l’œuvre, sur l’utilisation d’éléments vibrants suspendus devant un fond en double trame (Carré virtuel bleu, 1978-79, Paris).
Larry Poons
Peintre américain, Larry Poons (Tokyo 1973) fait ses études musicales avant d’entrer à la School of Fine Arts de Boston (1955-57). Il s’installe à New York, il subit l’influence des champs chromatiques de Newman et, comme Olitsky, Noland ou Louis, produit des œuvres qui relèvent du minimalisme. Son abstraction chromatique revêt la forme d’un semis de taches colorées rondes ou ovales réparties suivant une ordonnance géométrique précise et superposées à des fonds de couleurs saturées. Poons parvient à suggérer un mouvement et une animation par le contraste et le scintillement des couleurs confrontées : Bois de rose (1966). A partir des années 1970, redécouvrant l’importance du dripping de Pollock, il change d’orientation et réalise des œuvres en projetant directement une peinture épaisse sur des toiles debout, laissant couler et se mélanger librement les couleurs, de haut en bas, en pluie où en cascade.
Les compositions de Poons très rythmées évoquent des parois d’argile granuleuse parcourues d’infiltrations, des paysages abstraits libérés de tout programme et de tout système. Dans ses toiles plus récentes, Poons ajoute aux pigments du papier, du coton et des substances végétales (Foreign Forever, 1988) pour expérimenter d’autres possibilités de mise en espace de la couleur.